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Billet d’humeur- Réflexion sur la consommation

Depuis le 2 août 2017, nous vivons tous à crédit.

Un crédit revolving dont nous sommes tous souscripteurs plus ou moins à notre insu. En cause ? Notre façon de vivre et nos habitudes de consommation qui frôlent de plus en plus la démence depuis l’époque des 30 Glorieuses, l’âge d’or de l’achat du tout et du rien.

L’envie d’exotisme dans nos intérieurs, dans nos assiettes… a été poussé à son paroxysme depuis maintenant plusieurs décennies.  Du teck en passant par l’avocat ou encore l’huile de palme…voici quelques exemples de beaux produits importés dont les coûts pour l’environnement sont bien plus élevés que le prix auquel nous les avons achetés.

En effet, tout achat d’un produit ou d’un matériau a un coût final global souvent bien plus élevé qu’il n’y parait et qui ne se cantonne pas à être évalué sous le seul angle financier.

Si, en tant que consommateur, on a souvent tendance à choisir un bien qui nous plait et qui correspond à notre budget en recherchant le meilleur rapport/qualité prix, il n’en demeure pas moins que ce qualificatif n’est pas transposable si on calcule l’empreinte écologique qu’aura eu notre choix à l’échelle de la planète.

Tout produit aura nécessité l’utilisation de ressources naturelles dans la plupart des cas non renouvelables ou ayant entrainé des pollutions diverses. Pour produire l’huile de palme par exemple, des palmeraies sont plantées à la place des forêts qui sont elles-mêmes rasées pour faire place à cette huile miracle qui apporte tant de moelleux dans nos produits transformés. Les conséquences de la déforestation sont connues : l’assèchement des sols, le ruissellement des eaux provoquant d’importantes inondations, la baisse de la biodiversité, les risques pour les populations humaines et animales (En Asie du Sud Est : les orangs outangs, les éléphants de Sumatra, les tigres…)

Le transport de ses matières et biens produits engendrera aussi de multiples pollutions à commencer par le rejet de C02 dans l’atmosphère qui ne fera qu’accentuer l’effet de serre.

Mais les produits alimentaires ne sont pas les seuls concernés ; les produits courants de nos vies modernes comme par exemples les smartphones sont générateurs de pollutions et responsables de conflits humains comme c’est le cas avec un minerai précieux, le coltan, qui sert à produire du tantale, matière indispensable rentrant dans la fabrication de certains composants électroniques des téléphones portables. Les réserves de celui-ci dans le monde sont assez rares et au Congo où il est présent, son exploitation est au cœur d’une guerre ayant fait des milliers de morts.

Toute fabrication, toute extraction, toute production sollicite l’utilisation de l’eau et des énergies fossiles, cela engendre des pollutions lors de la phase de production mais aussi lors des phases d’utilisation et de fin de vie, et c’est souvent ce que nous avons tendance à oublier. Pourtant, pour faire fonctionner nos appareils électroménagers ou numériques, nous consommons de l’électricité elle-même produite dans les centrales nucléaires à partir de combustibles nucléaires tels que l’uranium et le plutonium. Leur extraction mais aussi leur gestion en tant que déchet sont révélatrices de la problématique mondiale dans laquelle nous nous trouvons.

Produire est générateur de pollutions et un bien continue de polluer même quand il n’est plus en état de fonctionnement, d’où la nécessité de pratiquer le tri sélectif et de procéder mondialement à la valorisation de nos déchets-tout en limitant leur production- en permettant leur réutilisation. Mais cela ne sera environnementalement valable que lorsque les biens et les produits seront fabriqués de manière durable ou éco-conçus c’est-à-dire en limitant leur impact sur l’environnement et en permettant leur réutilisation une fois leur fin de vie atteinte.

Si aujourd’hui des progrès sont faits à échelles locales, il n’en demeure pas moins que les efforts produits ne sont pas suffisants dans la mesure où les populations continuent de consommer massivement comme on leur a appris depuis l’enfance.

Il serait plus que nécessaire d’inculquer aux générations actuelles et futures que les ressources que possèdent la Terre ne sont pas illimitées et que pour continuer à les utiliser il faudra à terme changer nos comportements et se restreindre à ne plus surconsommer.

Et cela ne passera que par l’éducation…ou la violence, comme c’est déjà le cas dans certains pays du monde où les conflits liés à l’eau font chaque année des millions de morts.

 

L’écart entre le besoin et l’envie

C’est sans doute la clé de la compréhension du monde. En effet, les populations ont tendance depuis plusieurs décennies à supplanter leurs envies à leurs besoins réels. Sociologiquement, les raisons sont multiples, le désenchantement du monde et la bulle du capitalisme y sont certainement pour beaucoup, mais l’éduction et la transmission ne sont pas en reste.

Même si la modernité a du bon, la surmodernité l’a complètement supplantée : tout va toujours plus vite et cela engendre une perte de sens à l’échelle globale. Si bien que nous ne sommes plus en mesure d’analyser nos priorités en tant que consommateurs, ce qui nous semble indispensable aujourd’hui ne l’était pas il y a 20 ans et pourtant aujourd’hui qui peut se passer de sa tablette, de son smartphone ou encore de sa connexion internet ? Nous vivons dans un monde connecté et cette connexion nous est indispensable pour vivre avec notre temps et communiquer avec autrui ; mais ceci au détriment de l’échange direct, du simple face à face.

Dans notre association locale, nous avons autant d’échanges en version numérique qu’en visu lors de nos permanences. Mais ce que nous relaie nos adhérents c’est que la communication s’est standardisée depuis une dizaine d’année, les mails par exemple ont supplanté les contacts humains voire manuscrits entre les consommateurs et les organismes où ils sont clients. Cela devient de plus en plus difficile d’obtenir un contact avec son conseiller financier, son opérateur de téléphonie, La Poste ou encore les enseignes d’électroménager. Beaucoup de consommateurs s’en plaignent. Et en effet, nous avons l’occasion de nous en rendre compte nous-mêmes en tant que conseillers litiges ; à l’heure de l’hypertechnologie et de la communication numérique, il est parfois bien difficile d’obtenir une réponse et un interlocuteur. Alors que les outils de communication sont de plus en plus nombreux et élaborés, la prise en charge des demandes n’est pas toujours effective.

Les litiges pourraient pour la plupart être évités voire résolus directement si la société dans laquelle nous vivons était à même d’échanger (écouter, débattre et recevoir) avec ses pairs. Il est à noter que ceci devient de plus en plus rare du fait de la standardisation des échanges, et la plupart des interlocuteurs n’ont « plus le temps » malgré un gain de temps rendu possible grâce au numérique.

L’envie a aujourd’hui tendance à supplanter le besoin, rien de plus naturel dans la mesure où ces 2 entités font intégralement parties de la consommation.

Les idéaux transmis par la société capitaliste sont aujourd’hui antagonistes avec le processus de régularisation de la consommation. Le capitalisme c’est l’enrichissement, or, celui-ci est rendu possible si un maximum de personnes consomme des biens massivement produits.

C’est mathématique : plus nous sommes nombreux, plus il y a de besoins et d’envies à satisfaire, plus les productions augmentent et plus les ressources sont exploitées. Sans parler de la notion d’envie, on peut prendre l’exemple du logement qui est assez caractéristique de notre problématique. Plus nous sommes nombreux sur un territoire donné, plus il va falloir de logements ; si ces derniers ne sont pas déjà construits (c’est souvent le cas), il va falloir le faire en modifiant donc les caractéristiques du territoire dévolu c’est-à-dire en rachetant des terrains vides ou aménagés et en y bâtissant un programme immobilier, si ce n’est pas le cas, il faudra donc éliminer des espaces naturels pour pouvoir s’établir. Ce schéma est transposable à l’infini.

 

La démographie en question

Sujet souvent tabou mais pourtant essentiel quand on s’interroge sur les enjeux planétaires et environnementaux. Nous sommes actuellement plus de 7 milliards d’humains sur Terre, et les prévisions avancées en 2050 par plusieurs scientifiques ont été depuis revues à la hausse. La question n’est pas de savoir si nous sommes trop ou pas assez mais plutôt de réfléchir aux conséquences de la surpopulation mondiale. Comme nous l’avons vu, nos modes de vie actuels ne sont pas compatibles avec la survie de la planète et la régénérescence des ressources naturelles.

En d’autres termes, nous consommons déjà trop et mal. Comment les choses pourraient-elles s’améliorer quand on aura dépassé les 10 milliards d’êtres humains sur Terre ? Une chose est sure si nous ne prenons pas conscience et n’agissons pas maintenant, le pire est à venir.

Actuellement, la consommation de l’Humanité dépasse de 70% les ressources disponibles, c’est-à-dire que pour couvrir les besoins humains, il faudrait 1.7 planète. Ce chiffre représente l’empreinte écologique moyenne par habitant à l’échelle mondiale, mais le chiffre diffère d’un pays à l’autre. Par exemple, avec nos modes de vies actuels en France, il nous faudrait 3 planètes !

Depuis le 2 août « jour du dépassement », nous avons donc consommé toutes les ressources naturelles que la Terre peut produire en un an. Ainsi, d’ici la fin de l’année 2017, nous allons irrémédiablement surexploiter les écosystèmes et compromettre les capacités de régénération. Cette consommation de masse est expliquée d’une part par la raréfaction des ressources mais surtout du fait des conséquences de nos modes de vies modernes : ainsi les arbres sont coupés trop tôt pour satisfaire nos besoins (nous chauffer, construire des meubles, faire du papier, augmenter les surfaces agricoles…), les poissons pêchés en trop grand nombre n’ont plus le temps de se reproduire et les stocks se raréfient, le Co2 rejeté est trop important pour être absorbé sereinement par les forêts et les océans.

A ce rythme, la Terre n’est plus en capacité de se sauver elle-même puisque nous la sollicitons trop par rapport à ce qu’elle est en mesure de nous offrir. Seul un changement de mentalité et donc de système politique et économique global couplé à une éducation écologique pourra enrayer ce phénomène, mais face au nombre grandissant d’individus sur Terre, cela semble à terme irréalisable.

 

Un gaspillage d’envergure

La massification de la production entraîne irrémédiablement une densification des déchets, qui pour la plupart ne sont pas réutilisables et donc continuent de polluer même lorsqu’ils sont pris en charge par les services dédiés. L’enfouissement des déchets ou leur incinération induisent diverses pollutions.

Mais le problème de la gestion des déchets (rappelons tout de même que la production de déchets en France, en 2012 s’élevait à 345 millions de tonnes) ne doit pas faire oublier les déchets en eux-mêmes.

On extraie donc des matières pour produire des objets mais ceux-ci sont pour la plupart tout de suite jetés (emballages alimentaires, sacs en plastique…) : une durée de vie très limitée mais un impact environnemental maximal.

Or, une grande part des déchets produits, notamment par les ménages, serait d’origine alimentaire. A l’échelle mondiale, on estime que 1.3 milliard de tonnes de nourriture serait jetée souvent même sans avoir été retirée de leur emballage ni consommée. Ce chiffre correspondrait à 1/3 des aliments produits dans le monde. Quand on sait que la faim tue encore des millions de personnes sur Terre et ce même dans notre pays, on se rend bien compte que les modes de production industriels et nos habitudes de consommation sont tout simplement néfastes pour l’Humanité.

Le gaspillage est partout et les ménages ne sont pas les seuls à en être responsables…bien au contraire. La grande distribution, les filières du BTP, les collectivités locales, les entreprises etc. (pour ne citer que ces seuls exemples) sont tout aussi garants de ce constat, du fait d’une mauvaise gestion et d’un manque de réglementation concernant l’utilisation et la commande des produits.

Nous sommes tous responsables à notre niveau, il serait grand temps d’en prendre conscience.

C’est bien notre modèle qui est à reconstruire.

 

La consommation dans sa globalité devrait donc être plus théorisée et raisonnée afin qu’un achat ne soit pas seulement un acte d’acquisition sans réflexion. Chacun de nos actes a des conséquences ici et ailleurs mais aussi dans le temps. Est-ce vraiment logique de consommer des tomates ou des melons l’hiver ? Est-ce raisonnable de consommer des denrées alimentaires produites à des milliers de kilomètres ? Ne pouvons-nous pas nous satisfaire des matériaux que l’on trouve à proximité de nos lieux de vie au lieu de choisir des essences et autres bois rares produits à l’autre bout de la Terre ? Ne pouvons-nous pas réparer ou faire réparer nos anciens équipements au lieu de les jeter pour acquérir la dernière version à la mode ? Pourquoi ne pas privilégier le troc, fabriquer à partir de matériels déjà existants ?

Repenser le monde, c’est se réinventer soi-même.

L.Bourgiteau

Pour aller plus loin………

http://www.ademe.fr/

https://www.amnesty.be/infos/actualites/article/l-accord-de-l-ue-sur-les-minerais-du-conflit-un-commerce-meurtrier-qui-perdure

http://www.huffingtonpost.fr/2017/08/02/derriere-le-jour-du-depassement-le-point-de-non-retour-a-lho_a_23059874/

http://www.cnrs.fr/cw/dossiers/doseau/decouv/mondial/05_eau.htm

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