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Utiliser des protections hygiéniques n’est pas sans risques !

Les cycles menstruels font pleinement partie de la vie des femmes. Une période critique de quelques jours par mois à laquelle nulle femme ne peut échapper…Régénération naturelle parfois douloureuse, souvent embêtante mais jamais euphorique comme pourrait nous laisser croire les campagnes publicitaires ventant les mérites des protections hygiéniques.

Les menstruations féminines sont encore aujourd’hui considérées comme un véritable tabou sociétal. Les métaphores et synonymes utilisés pour parler des règles illustrent parfaitement cet état d’esprit : « être indisposée », « avoir ses trucs », « avoir ses ragnagnas », « avoir ses coquelicots »… Le mot sang n’est jamais cité mais souvent représenté par quelque chose de couleur rouge ; puis dans les autres cas, on utilise des mots passe partout laissant entendre que l’on a « nos choses ».

Pour autant, rien de sale ni de foncièrement horrible, mais la gène, la honte, la peur de la raillerie font que les femmes entretiennent ce phénomène de tabou, comme si avoir ses règles était quelque chose d’impropre ou d’impur au sens religieux du terme. Ce malaise entre femmes mais aussi avec les hommes perdure. Or, cette pudeur insolente est aussi véhiculée par les fabricants de tampons et de serviettes hygiéniques qui ont tendance à mystifier les menstruations en les rapportant à un « pas grand-chose » qu’il faut cacher à soi-même et aux autres afin de continuer à paraître pure et naturelle.

Mais peut importe que l’on soit serviettes ou tampons hygiéniques, nous sommes toutes consommatrices de dispositifs d’absorption pouvant minimiser notre gène et améliorer notre confort durant ces périodes. Pour autant savons-nous réellement ce que nous portons à même la peau durant nos cycles ? Comment bien utiliser ces dispositifs ? Et quels risques nous encourrons à en porter régulièrement tout au long de notre vie ?

 

Un désir de transparence

En 2015, une jeune étudiante française avait lancé une pétition sur internet pour demander à la marque Tampax de dévoiler la composition de leurs produits. En effet, contrairement aux autres produits d’hygiène, les protections périodiques font partie des biens de consommation classique. Là où les produits cosmétiques doivent mentionner en toute lettre les ingrédients qui les composent, serviettes hygiéniques comme tampons en sont exempts.

Cette demande légitime de transparence peine à voir le jour en Europe malgré les demandes de plus en plus nombreuses de la part des consommatrices. L’Eurodéputée Michèle Rivasi avait obtenu suite à cette même demande auprès des autorités Européennes, une fin de non recevoir. Comme elle l’a expliqué : «  La Commission a pris note de la communication des autorités françaises du 04/03/2016 indiquant que les études récentes n’ont révélé aucun risque pour les utilisatrices ». Il faut dire que l’Europe a décidé de laisser carte blanche aux fabricants  de choisir eux-mêmes leur charte de bonne conduite.

Suite à la polémique, Tampax a indiqué que la composition de ses produits était notifiée sur leur site internet. Mais ceci semble être insuffisant et démagogique dans la mesure où toutes les consommatrices veulent pouvoir s’informer en temps réel au moment de l’achat et ainsi pouvoir comparer différents produits entre eux, sans avoir à se connecter sur le site du fabricant pour obtenir une information qui pourrait tout aussi bien être présente sur les paquets. Cela devrait évoluer dans les prochains mois…

 

Les composants de base des protections intimes

La plupart des protections périodiques sont composées de coton, d’agents absorbants (souvent un mélange de viscose obtenu à partir de cellulose ajouté à de la soude) et d’agents de blanchiment (soit via un processus « naturel »  avec l’oxygénation, soit avec du chlore).

On pourrait croire que la présence de coton a un côté rassurant car naturel, mais il ne faut pas oublier que la culture du coton est l’une des plus polluante au monde parce qu’elle demande beaucoup d’eau mais surtout parce qu’elle est traitée à outrance avec des pesticides.

Quant à la cellulose présente dans les protections intimes, elle est souvent l’élément principal mais toutes sortes de plastiques peuvent aussi composer ces produits ainsi que les polyoléfines, les polymères, les polypropylènes, les polyesters…sans parler des parfums.

Il faut savoir que la cellulose est à la base une matière naturelle, puisque celle-ci provient des arbres, une fois la transformation effectuée, la matière ressort de couleur brune. Mais des éléments chimiques sont ensuite rajoutés afin de blanchir le produit afin de lui donner un aspect plus « propre » plus « vendeur ». Or, ces substances blanchissantes tels que le dioxyde de chlore, est un produit chimique dangereux pour les organismes et hautement polluant ; il serait par ailleurs cancérigène.

Pour le reste, obtenir la liste des composants des protections périodiques ne signifie pas que l’on obtiendra le recensement des substances chimiques utilisées lors du processus de fabrication.

D’après des tests indépendants opérés par le chimiste Bernard Tailliez, de nombreux composants chimiques – entre 20 et 30- seraient présents dans les tampons hygiéniques. La présence de phtalates dont le DEHP (interdit par l’Union Européenne) et de pesticides comme le glyphosate n’est plus à démontrer. Ces résidus chimiques, pour la plupart perturbateurs endocriniens auraient un lien avec les problèmes de fertilité féminine…Le cas des tampons hygiéniques  et leur concentration en phtalates est actuellement étudié par le docteur Carmen Messerlian qui tente de faire le lien avec la recrudescence des problèmes de fécondité à travers le monde.

Aujourd’hui, personne n’est à- même de nous garantir que ce que nous portons périodiquement de façon prolongé n’est pas sans risque, d’autant plus qu’aucune étude n’a été faite en ce sens ; ce qui parait tout à fait anormal quand on sait qu’en moyenne une femme portera au cours de sa vie près de 11000 tampons.

En tant que consommatrices, nous devrions connaître la composition exacte et les substances utilisées dans ces protections, mais il serait aussi souhaitable que des études indépendantes soient menées à court et long termes afin que l’on connaisse exactement les risques auxquels nous sommes exposées en étant en contact avec ces substances synthétiques.

Mais il ne faut pas omettre que ce sont les mêmes substances que l’on retrouve aussi dans les couches pour enfants et les protections pour adultes. A cet effet, tout au long de notre vie, nous sommes en contact avec ces produits, de quoi nous alerter un peu plus sur ce scandale de poubelle chimique qui nous concerne toutes et tous.

 

Protections périodiques et syndrome du choc toxique (SCT)

D’après Gérard Lina, microbiologiste français, il existe un lien évident entre le SCT et le port prolongé des tampons. Comme il l’a expliqué dans le reportage Tampon : notre ennemi intime, « certaines femmes sont porteuses du staphylocoque doré et celui-ci se développe au contact du tampon ». Le fait d’enfouir dans la cavité vaginale un corps étranger serait propice au développement de la toxine puisque l’humidité et la chaleur permettraient sa libération en passant dans le sang. De plus, des études récentes ont montré la grande perméabilité des tissus vaginaux, ce qui laisserait penser que toutes les substances contenues dans les protections périodiques, tampon en particulier, seraient absorbées par le vagin.

Le SCT est difficilement diagnostiqué comme l’expliquent les victimes ; car la plupart du temps, les symptômes sont commun à un état grippal et de type gastro-entérite. Cela varie d’une femme à l’autre mais la plupart des signes convergent vers une grande fatigue, des maux de ventre, de la fièvre, des réactions cutanées allant de la rougeur à l’œdème. Dans tous les cas, l’état de santé s’aggrave rapidement et l’infection prend le dessus. Peu à peu,  les organes vitaux ne répondent plus et se mettent en mode survie ce qui signifie que les extrémités ne sont plus irriguées, d’où le risque d’amputation. C’est justement ce qu’a vécu Lauren Wasser, mannequin d’une vingtaine d’années, amputée d’une jambe suite à une SCT.

Bien qu’il puisse être traité avec des antibiotiques quand il est repéré à temps, le SCT est loin d’être anodin, le traumatisme peut être grand car les organes vitaux ont pu être affectés. Mais il peut aussi être mortel.

Les cas recensés en France sont en constante augmentation, malheureusement, les médecins et autres spécialistes ne sont pas formés et passent souvent à côté du diagnostic, ce qui en plus d’avoir des conséquences désastreuses pour les victimes, laisse penser que les chiffres sont nettement minimisés. D’ après le Professeur Lina, les cas de SCT auraient été multipliés par 4 en 12 ans, d’où l’importance d’analyser la composition des protections intimes afin de comprendre le développement du staphylocoque et de palier à sa recrudescence.

On estime qu’environ 20% des femmes victimes de SCT ne savent pas ce qui s’est passé et continuent d’utiliser les tampons une fois rentrées chez elles.

 

Des centaines de victimes dès les années 70 aux USA

A la fin des années 1970, le fabriquant Prosper & Gamble a sorti un nouveau produit : le tampon Rely qui se voulait révolutionnaire car super absorbant. De nombreuses femmes mourraient pendant leurs règles, certaines n’arrivaient pas à enlever leur tampon elles-mêmes…Le Rely fut l’un des tout premiers tampons synthétiques mis sur le marché. Plus de 600 cas de SCT ont été recensés suite à l’utilisation de ce produit, plus de 100 femmes sont décédées suite au port de ce tampon. Moins d’un an après sa mise sur le marché, le Rely a été retiré de la vente non sans mal. A l’époque, la haute autorité de santé américaine n’avait pas donné suite aux alertes lancées par quelques professionnels.

Cette épidémie a été très peu médiatisée en Europe, les fabricants préférant tuer la polémique dans l’œuf afin de ne pas ternir leur image.

Il faut dire aussi que les fabricants de protections intimes réalisent des chiffres d’affaires colossaux estimés ces dernières années à près de 30 milliards de dollars (chiffre mondial), et ces chiffres ne risquent pas de retomber au vue de l’explosion démographique mondiale et le vieillissement de la population.

 

De quoi se poser des questions

Sans parler de SCT, l’exposition répétée peut aussi avoir des conséquences sur notre organisme. Irritations, mycoses, mais aussi des maladies plus graves telles que certains cancers pourraient provenir du port prolongé de ces dispositifs.

Anne Tristan, médecin, nous rappelle que : «  l’atmosphère confinée, le fait que le vagin soit totalement bouché et que les tissus ne soient pas oxygénés, favorise la production de la toxine par la bactérie. Les notices de tampons parlent de 4 à 8 heures de port mais clairement 8h c’est déjà trop : se rapprocher des 4 heures est raisonnable ».

Alors que faire ? Dans tous les cas, il faut dans la mesure du possible favoriser un autre type de protection intime, le tampon étant particulièrement dangereux du fait de son contact étroit avec les muqueuses du sexe féminin. Privilégier les serviettes hygiéniques semble être une moindre solution puisque ce sont bien les mêmes substances qui sont utilisées par les fabricants, le seul avantage est que les serviettes permettent l’écoulement naturel des menstrues et ne bouchent pas la zone. De plus, voir son flux directement permet aussi de prendre conscience de l’utilité de renouveler sa protection hygiénique. A terme, d’autres solutions plus écologiques et moins nocives devront être prises par les femmes comme accepter d’utiliser des serviettes lavables en coton ou substrat biologique, de choisir des protections biologiques ou d’adopter de nouveaux dispositifs tels que la cup menstruelle.

En tant que consommatrices, nous avons le pouvoir d’agir et de changer la donne ; nous devons exiger de la part des fabricants la transparence, car il s’agit de notre santé et de celles des futures générations. Mais plus encore, nous devons nous battre pour que cette « poubelle chimique » n’en soit plus une, et que des substances de qualité et non nocives soient utilisées à la place de ce dangereux cocktail; qui nous le rappelons ne coûte actuellement pas grand chose aux fabricants mais leur rapporte énormément!

 

L. Bourgiteau

Pour aller plus loin…

« Tampons et serviettes hygiéniques. L’opacité entretient les peurs », Fabienne Maleysson, 18/03/2016

Tampon. Notre ennemi intime, Audrey Gloaguen, 2017

Tampons et serviettes : ces substances que nous cachent les fabricants, La Quotidienne, 06/01/2014 https://www.youtube.com/watch?v=G-r75Ya_cPI

Composition des tampons : la fin de l’opacité ?, La Quotidienne, 21/03/2017

https://www.quechoisir.org/actualite-tampons-periodiques-un-documentaire-qui-oublie-l-essentiel-n42844/